Le DPE au cœur des enjeux immobiliers : fiabilisation, contraintes juridiques et avenir incertain
Le diagnostic de performance énergétique (DPE) est devenu, en France, un outil incontournable dans la politique de rénovation énergétique. Obligatoire pour les ventes et les locations depuis respectivement 2006 et 2007, il permet d’évaluer la consommation d’énergie d’un logement et son impact en matière d’émissions de gaz à effet de serre.
La réforme intervenue en juillet 2021, issue de la loi Elan, a modifié en profondeur le mode de calcul du DPE. En remplaçant la méthode des consommations réelles par une approche basée sur les caractéristiques physiques du bâtiment, l’objectif affiché était d’objectiver la performance énergétique. Cette réforme a renforcé le caractère opposable du DPE, ce qui a accru ses effets juridiques sur le marché immobilier.
Un outil au service de la transition énergétique
La politique publique s’est appuyée sur le DPE pour imposer un calendrier progressif d’interdiction de location des logements les plus énergivores : les biens classés G sont interdits à la location depuis 2025, ceux classés F le seront en 2028, et ceux classés E en 2034. De plus, depuis 2023, la performance énergétique est intégrée dans les critères de décence des logements.
Pour accompagner cette transformation, l’État a mis en place MaPrimeRénov’, un dispositif financier incitatif pour les propriétaires. Réformé en 2024, ce mécanisme encourage les rénovations globales avec un plafond de subvention porté à 70 000 euros. Toutefois, des dérives ont été constatées : surfacturations, fraudes et engorgement des services ont conduit à une suspension temporaire du dispositif durant l’été 2025.
Des effets secondaires préoccupants
Malgré les aides, la réalité est plus nuancée. Seuls 32 % des propriétaires concernés envisagent des travaux de rénovation. Beaucoup choisissent de vendre ou de relouer en l’état, ce qui a des répercussions directes sur l’offre locative. À Paris, l’offre de logements à louer a chuté de 74 % en trois ans, avec une raréfaction marquée pour les passoires thermiques.
La Cour des comptes, dans un rapport publié le 3 juin 2025, alerte sur les lacunes persistantes du DPE : fiabilité incertaine, formation inégale des diagnostiqueurs, pressions des propriétaires, manque de contrôles. Elle appelle à un encadrement renforcé de la profession, et soutient la création d’un ordre des diagnostiqueurs pour garantir la qualité des évaluations.
Un cadre en pleine évolution
Le gouvernement, à travers un plan d’action annoncé par la ministre du Logement, prévoit des mesures de fiabilisation et de contrôle renforcées dès juillet 2025. Cela inclut une amélioration des compétences requises, une surveillance accrue des organismes certificateurs et un pilotage national unifié du DPE.
Si le DPE demeure un levier essentiel pour atteindre les objectifs de neutralité carbone, son efficacité dépendra de la capacité des pouvoirs publics à en restaurer la crédibilité et à accompagner équitablement les propriétaires face à ces nouvelles contraintes.